@La question sociale


Le tapis à histoires (Centre social /Maison pour tous Saint Mauront – Marseille)

Entretien réalisé le 7 juillet au Centre social /Maison pour tous Saint Mauront Léo Lagrange Méditerranée de la rue Félix Pyat MARSEILLE   Filigranes a rendez-vous aujourd’hui au centre social Léo Lagrange, dans le 3e arrondissement de Marseille, rue Félix Pyat, à deux pas du métro National, pas très loin de l’autoroute qui surplombe le quartier où se juxtaposent maisons anciennes et immeubles plus récents, notamment le siège d’Orange. Dans la cour du centre, une zone a été réservée pour un jardin dont s’occupe Mohamed Barka, oasis de verdure au milieu du béton. Non loin du centre social, un jardin partagé éphémère, appartenant à la Soleam et dont la gestion a été confiée à la Maison Pour Tous St Mauront est entretenu amoureusement par une dizaine de familles du quartier.  En ce début de juillet, il y a des tomates, des courgettes, des aubergines, des haricots, les plants de courge occupent une place imposante. Il y a aussi des fleurs, des plantes aromatiques, et le jardin est équipé de sièges confortables. Mais il fait trop chaud pour rester au jardin et l’entretien se déroule au centre social avec Amande Le Blanc, la responsable du secteur familles du centre, Samia Azizi, conteuse et membre de l’association ACELEM, qui anime l’espace lecture du quartier, et trois personnes qui ont participé à l’aventure du tapis à histoires, Zineb, Sahada et Husna, d’origine maghrébine, comorienne et kenyane. Nana et Fatima, bénévoles responsables de […]


Donner une voix à la périphérie / Les littératures post-coloniales – Entretien avec Markus Arnold

Cursives 68 Entretien avec Markus Arnold   Qui êtes-vous, Markus Arnold ? Markus Arnold : J’ai 26 ans. Je suis pour 2 ans lecteur d’allemand à l’école normale supérieure de Lyon. J’ai fait des études de philologie romane et de lettres anglais en Allemagne et suis actuellement en thèse de littérature comparée. A Lyon, je travaille entre autres avec des étudiants qui se préparent à l’agrégation et sont censés être très forts en allemand ! Filigranes : Pourquoi as-tu un jour décidé d’apprendre le français ? MA : D’abord par nécessité scolaire, il me fallait une troisième langue au lycée, puis par goût. Au-delà de l’aspect linguistique, il y a la civilisation, la culture, les échanges que j’ai connus vers l’âge de quinze ou seize ans : mes premiers vrais contacts en tant qu’individu, sans commune mesure avec les voyages en famille, les films, les médias. Passer sept semaines en France, sac à dos, tout seul, faire du stop, dormir dans les auberges de jeunesse, c’est le début d’un grand amour. . L’Île Maurice et les Mascareignes Filigranes : Peux-tu nous dire un mot de la recherche que tu mènes actuellement ? M.A. : Mon travail de thèse porte sur le roman contemporain mauricien d’expression française et anglaise. Je tente d’y repérer les convergences entre deux esthétiques post-coloniales : l’une francophone, l’autre anglo- saxonne. Filigranes : Peux-tu nous citer quelques auteurs mauriciens ? M.A. : Shenaz Patel, Ananda Devi, […]


La pédagogie est-elle une création ? – Un entretien avec Antoinette Battistelli

  Filigranes propose dans ce Cursives  62 (2004) un entretien avec Antoinette Battistelli, professeur des écoles et maître formateur.   L’échange porte sur les liens entre démarche pédagogique  et démarche créatrice. Antoinette Battistelli est plasticienne à ses heures, elle participe aux travaux du GFEN Provence, elle conçoit et anime avec ses pairs des ateliers de création, mais surtout elle invente pour ses élèves de Cours élémentaire (7/8 ans) et ses stagiaires de l’IUFM des situations d’apprentissage appuyées sur l’activité créatrice. L’entretien fait suite à une matinée passée en classe avec elle et ses élèves. Créer, c’est accumuler et transformer Filigranes : L’idée que nous avons en tête, c’est celle d’une comparaison possible entre la pédagogie comme acte de création et la création proprement dite, plastique notamment. C’est la première fois que nous abordons cette question dans Filigranes. Quels parallèles vois-tu ? Antoinette Battistelli : Je me suis souvent interrogée sur les raisons pour lesquelles, à titre personnel, je crée si peu plastiquement et sur la place qu’occupe dans ma vie ce que je fais en classe avec mes élèves, que je considère comme des créations. Un premier élément qui à mes yeux fait lien, c’est la notion de transformation. En création, on ne part pas de rien (je pense à Picasso allant voir les Inuits et les Africains avant de peindre ses portraits), en pédagogie non plus. Quand je lis telle ou telle séance dans le livre du maître, […]


« La maison des Savoirs » à Bruxelles – Martine Hosselet-Herbignat

Filigranes N°60 « Le don du texte » Novembre 2004 Martine Hosselet-Herbignat est citoyenne belge, volontaire dans le mouvement ATD Quart-Monde depuis 1980. En 1988, avec Pierre, son mari, elle crée « La maison des Savoirs » à Bruxelles où elle anime jusqu’en 1994 l’atelier « Art et Poésie ». Depuis, ils ont rejoint, avec leur famille, l’antenne du mouvement ATD Quart Monde à Marseille où Martine est plus particulièrement en charge du dialogue interculturel et des relations avec des personnes engagées dans la lutte contre la pauvreté tout autour de la Méditerranée. Elle a écrit 2 romans, Clin d’œil à l’ami Picasso (1996, éd. Quart-Monde), dont l’action est située à Bruxelles, et A la première personne (2003, éd. de l’Harmattan) dont l’action est située à Marseille.   1. Qu’est-ce qui t’a poussée à écrire ton premier livre ? Après avoir vécu pendant plusieurs années une expérience très forte de partages et d’actions avec les familles en grande pauvreté, je me suis dit qu’il fallait que j’écrive quelques chose qui mettrait en scène des personnages très proches de ceux que je connaissais. Le roman me permettait de donner à la fois une profondeur aux personnages tout en me laissant la liberté de combler les vides de l’histoire par ce qui venait de moi. Je pouvais puiser dans ma vie, dans mon expérience, pour faire se rejoindre les différentes histoires. En effet, souvent, les personnes très démunies ne se rappellent pas ou n’ont pas gardé de traces […]


« Créations croisées, savoirs solidaires ». – Entretien avec Karyne Wattiaux

Paru dans Cursives N°58 Filigranes a rencontré Karyne Wattiaux, conseillère pédagogique en alphabétisation, animatrice d’ateliers d’écriture et écrivain et Mariska Forrest, plasticienne. Elles évoquent ici leur utopie des mercredis soir : un étonnant projet d’écriture dans lequel un public mixte de « lettrés » et « d’illettrés » écrit et produit plastiquement et finit par publier une dizaine de livres… Un projet dont le récit et l’analyse  nous éclairent sur la fertilité du principe de coopération et nous invitent à inscrire la création dans le long temps du partage.   Commençons par la fin. Vous arrivez au terme d’un projet de cinq ans et demi. Karyne Wattiaux : Oui, c’est une boucle qui se referme sur une suite de petits  projets qui n’en forment qu’un : mettre en œuvre des projets collectifs tout en permettant à chacun d’expérimenter et d’acquérir des savoir faire tant artistiques que solidaires. Au début du projet, nous ne savions pas que nous étions au commencement d’aventures multiples qui nous conduiraient jusqu’à aujourd’hui. Durant toutes ces années, nous nous sommes arrêtés tous les trois à six mois. C’est lors de ces bilans qu’ensemble, nous décidions de poursuivre ou pas et si oui sur quelles bases de travail. Ces moments permettent à chacun de se repositionner par rapport à ce qu’il a produit, ce qui a eu lieu. De repartir vers d’autres possibles décidés ensemble. Ce petit peuple de l’utopie qui gravite autour du projet Filigranes : Qui participe à ce groupe […]


« Écrivain public, auteur conseil » – A propos d’un diplôme universitaire mis en place par l’Université de Toulon La Garde

Cet entretien est paru dans Filigranes n°57 « Ici, midi » Novembre 2003 Nous présentons ici l’entretien qu’on mené à distance, par courriers interposés, deux étudiantes du D.U. d’écrivain public / auteur conseil avec trois de leurs enseignants.  Michèle Monte, Odette et Michel Neumayer répondent aux questions de Sylvie Combe et de Gislaine Ariey. Aux origines  de cette formation Dans quelles circonstances la Faculté de Toulon a-t-elle fait appel à vous ? Savez-vous pourquoi ? Michèle Monte : L’Université de Toulon a fait appel à moi pour imaginer la formation d’écrivain public, parce que j’animais des ateliers d’écriture à la Faculté de Lettres et peut-être aussi parce qu’on connaissait mon engagement social auprès de personnes en difficulté. Je me suis alors intéressée à la profession d’écrivain public et j’ai découvert qu’elle était en plein renouveau, il m’a donc semblé qu’il était pertinent de proposer une formation à ce métier, et j’y ai été encouragée par les écrivains publics que j’ai contactés. En quoi celle formation vous parait-elle pertinente ? Michèle Monte : Si l’on compare le D.U. de l’Université de Toulon avec la licence professionnelle proposée à l’Université de Paris III, il y a d’évidents points communs qui résultent de la nature même de la profession : celle-ci nécessite une polyvalence d’où une formation pluridisciplinaire où le droit social, le droit fiscal ou le droit des associations côtoient la bureautique, les pratiques rédactionnelles, l’entraînement à la recherche historique ou à l’interview. Mais l’originalité […]


LE POLAR : UNE AUTRE FAÇON D’ÉCRIRE L’HISTOIRE – Entretien avec René Merle

Cet entretien est paru dans Filigranes n°49 « Polars & Cie » Avril 2001 Avec René Merle le polar s’enracine dans un territoire et son histoire. René MERLE retrace pour FILIGRANES quelques étapes de son itinéraire : du professorat à la langue et à la poésie occitanes, de l’écriture à l’histoire. Un itinéraire qui aurait pu semblé tout tracé, si le désir de transmettre son savoir à d’autres, une rencontre et quelques événements politiques récents et plus anciens ne l’avaient fait bifurquer. René Merle est l’auteur de Treize reste raide, paru en 1997 aux éditions Gallimard (collection Série Noire).   Occitanie Filigranes : René Merle, avant de parler plus précisément de votre polar Treize reste raide, parlez-nous un peu de votre parcours. René Merle : Je suis né en 1936, ce qui veut dire que je fais partie de cette génération qui a connu une France qui, par certains côtés, était presque identique à celle du XIXe siècle, puis ces Trente Glorieuses où on a découvert la société dite de consommation, où on a traversé les guerres coloniales, le mouvement de 68. Cela amène à un certain pessimisme : on a l’impression que le monde s’est grandement amélioré sur le plan matériel, mais ne correspond pas à ce qu’on aurait souhaité sur le plan affectif, spirituel. A côté de ça, j’ai été prof toute ma vie, et c’est un métier qui m’a beaucoup plu. J’ai été normalien, j’ai été reçu à l’ENSET et j’ai […]


« Ecrivain public et biographe » (Marie-Christine Ingliardi)

Ecrivain Public et Biographe Un entretien avec Marie-Christine INGIGLIARDI   Écrivain public : « Nom masculin bien que souvent féminin… Sorte de porte-plume doté d’oreilles bienveillantes et attentives, utile lorsqu’on trouve les mots pour le dire mais pas ceux pour l’écrire. Domaines d’intervention : de la lettre de motivation au roman, du recours administratif au poème, du rapport de stage à la lettre d’amour, du mémoire aux Mémoires… » Telle est la définition que Marie-Christine INGIGLIARDI, écrivain public et biographe à Sisteron, donne de son métier. Un métier qu’elle évoque ici pour les lecteurs de Filigranes…    Filigranes : En quoi consiste votre travail d’écrivain public et biographe ? Quelles sont vos différentes activités et qui sont vos clients ? Marie-Christine INGIGLIARDI : Tout d’abord, si je dis « Écrivain public »quand on me demande ce que je fais dans la vie, il faut bien reconnaître que ce n’est pas ce qui me fait vivre. Pour le bulletin de paye, j’ai d’autres activités qui tournent toutes autour de l’écriture (alphabétisation, soutien scolaire, communication…) mais ont en commun d’être décemment rémunératrices. Lire la suite « Ecrivain public et biographe » Entretien avec Marie-Christine Ingigliardi (N°54)  


« La femme de l’écrivain » (Aline Autin-Grenier)

La femme de l’écrivain… Entretien avec Aline Autin-Grenier Aline Autin-Grenier est enseignante de Lettres Modernes dans le Vaucluse où elle vit à la campagne avec l’écrivain Pierre Autin-Grenier depuis une vingtaine d’années. Elle a publié dans FILIGRANES Q : Ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est d’aborder la question de l’écriture à travers ce que peut en dire une personne qui, comme toi, partage la vie d’un écrivain. Une personne qui occupe la position de témoin, de spectateur peut-être, face à un travail en cours. Autrement dit, de quoi témoigne « la femme de l’écrivain », ce personnage emblématique, à la fois irremplaçable et méconnu, cette figure de l’ombre sans laquelle bien des textes n’auraient pas vu le jour… Sur la scène littéraire et sociale A.A-G.: Depuis 3 ou 4 ans, Pierre est assez souvent invité à lire ses textes et à rencontrer le public. Il se déplace beaucoup pour quelqu’un qui n’est connu que dans un milieu littéraire restreint. Il a été invité à Caen, où François de Cornières organise les « Rencontres pour lire », à Châtenoy-le-Royal dans la banlieue de Chalon-sur-Saône, (non loin de Lyon où il a ses racines), et dans bien d’autres lieux encore…  Or, il lui est brusquement devenu impossible de se déplacer si je ne suis pas là. Invité récemment à Landreville (Aube), – c’était le premier week-end de la rentrée-, je dis : « tu prends la voiture », car étant donné la date et la distance ça […]


« Je n’avais réalisé que j’aurais pu apprendre à mon âge » (Claudette Berthon)

« Je n’avais jamais réalisé que j’aurais pu apprendre à mon âge … » Un entretien avec Claudette BERTHON, militante associative, membre de ATD Quart-Monde, auteur de FILIGRANES.   Q.-  Quand as-tu commencé à lire et à écrire ? Cl.B.-  Pour de bon, sérieusement, en 79-80. J’avais presque 40 ans. Dire que je ne savais pas lire du tout, c’est grossier, je savais déchiffrer, comme un enfant de 6 ans qui lit sans comprendre. C’était un rudiment, mais lire couramment, j’en étais incapable. Q.-  Ça a été quoi, le déclencheur ? Cl.B.- Je n’avais jamais réalisé que j’aurais pu apprendre à mon âge. A l’école, avec les professeurs, on se sentait un peu refoulés, je m’étais recroquevillée dans ma coquille. Peut-être que je ne sentais pas le besoin d’écrire. Le déclic, c’est qu’en commençant à militer, j’ai voulu goûter de tout, voir tout… Cl.B.-  Je faisais déjà partie des associations du quartier. J’aurais pu me contenter de savoir lire les titres du journal, écrire quelques phrases. Mais je me revois encore à une réunion de militants d’ATD Quart Monde à Marseille. Il y avait des femmes qui apprenaient à lire et qui avaient mon âge. Je me suis dit « Je suis pas plus bête qu’elles. » Ça a été le déclic  Life le suite : « Je n’avais réalisé que j’aurais pu apprendre à mon âge » Entretien avec Claudette Berthon, militante de la lecture et de l’écriture. Militante de ATD-Quart Monde. (N°35)