« Intime VS extime » – 2007


Edito

Ce qu’on ne peut pas dire, il ne faut surtout pas le taire, mais l’écrire.
Jacques Derrida 1930-2004

Nous pourrions rapidement nous accorder sur l’essence de l’intime : le plus brûlant, le plus secret dans l’être, à peine connu de lui, uniquement privé. Mais pour ce qui est de l’extime ?  

Michel Tournier nous a offert le néologisme en qualifiant ainsi son journal1.  Chaque auteur fait la part entre ce qui ne se dit ni ne se montre et ce qu’il proposera au vu et au su de tous. Le texte est un coup de force sur l’intime, un aveu qui se voile de mots et qui a trouvé sa forme, son genre. L’écriture tient du choix et de la décision : obscurité ou transparence, on ne dira pas tout car tout n’est pas dicible, mais on se dira. Qu’il s’agisse de solitude, de rêves, de regrets, de l’enfance et de ses peurs, mais aussi de la voix et du silence, du mystère de la mort, de la prière, de la joie…

Toute littérature n’est-elle pas marquée au vif par cette part de soi – normes et vérité assumées – que l’auteur engage dans ses écrits, consciemment ou à son insu ? Façonnée par cette relation ambiguë nouée avec son lecteur ?

Intime versus extime : sait-on lequel engendre l’autre ? Ruban de Möbius ou bouteille de Klein. Sait-on ce que l’écriture gagne à cette complémentarité ?

Facile de jouer l’opposition comme on le ferait du jour et de la nuit, entre ce qui se passe au-dedans et ce que l’on perçoit au-dehors. Il y aurait la partie visible de l’iceberg et l’autre. Sur la ligne de flottaison où des signes affleurent, fragments d’un intime qui demande à se dire, l’écriture, tantôt poétique, tantôt narrative, sera le lien.  

Le lecteur quant à lui resingularise, fait œuvre   d’interprétation. Il a souvent l’intuition, la perception subtile, parfois désagréable, d’avoir franchi un seuil, d’être témoin d’une scène qui ne lui appartient pas, qu’il ne comprend pas ou trop bien.

Pas de solution toute faite, à chaque ligne un nouveau sens se lève, d’autres se pressentent. À peine ordonnés et sitôt lus, les mots renforcent l’énigme.

Odette et Michel Neumayer
16.03.07

 

 

Sommaire

 

Odette et Michel NEUMAYER         Editorial       3

 

À discrétion  

Marie-Christiane RAYGOT, Comme toujours la solitude… 5
Marie-Noëlle HOPITAL, Extrait du for intérieur, 6
Marie-Françoise BELAIZI, Bouquet d’hiver, 8
Elisabeth CAPRON, J’habite un petit cube de verre, 9
Bernard-Henri MAYAUDON, I.C.I., 10
Michèle MONTE, Argiles, 12
Odile DUBREIL, Plaisirs de l’indigeste, 14
ZIZABEL, Blocked Blog, 15
Geneviève BERTRAND, Voix incandescente, 16
Agnès PETIT, Il était un temps… 18
Teresa ASSUDE, Opacité, démesures, 19
Cédric LERIBLE, Raccord à faire… 20

 

Cursives

Entretien avec Francis FINIDORI
Quelques réflexions sur l’oeuvre du plasticien Jean Amado
et la réalisation d’un catalogue à paraître.            

 

Transactions secrètes                

Josiane HUBERT, Sa vie… / La vie…  32
Isabelle ZUMMO, Expression, visages et mystère, 34
Geneviève LIAUTARD, Ville misère, 35
René COHEN, Epiphanie de l’éphémère, 36
Anne-Marie SOUFFLET, Communiqué, 37
Odette NEUMAYER, Dans le désert du Karakum, 38
Anne-Marie SUIRE, C’était au temps lointain… 40

 

Renégocier la dette

Mireille GRIZZO, La passagère, 42
Bernard MORENS, Généalogie, 44
Annie CHRISTAU, Maisons, 46
Ygaëlle DUPRIEZ, La porte est grande ouverte, 48
Claude OLLIVE, Le père, 50
Catherine NUELLENS, L’art du voyage, 51
Jeannine ANZIANI, Deux = Un, 52
Lecarm, Ma vie, 54
Richard CABANèS, Je suis Aristakès…55