Donner une voix à la périphérie / Les littératures post-coloniales – Entretien avec Markus Arnold


Cursives 68
Entretien avec Markus Arnold

 

Qui êtes-vous, Markus Arnold ?

Markus Arnold : J’ai 26 ans. Je suis pour 2 ans lecteur d’allemand à l’école normale supérieure de Lyon. J’ai fait des études de philologie romane et de lettres anglais en Allemagne et suis actuellement en thèse de littérature comparée. A Lyon, je travaille entre autres avec des étudiants qui se préparent à l’agrégation et sont censés être très forts en allemand !

Filigranes : Pourquoi as-tu un jour décidé d’apprendre le français ?

MA : D’abord par nécessité scolaire, il me fallait une troisième langue au lycée, puis par goût. Au-delà de l’aspect linguistique, il y a la civilisation, la culture, les échanges que j’ai connus vers l’âge de quinze ou seize ans : mes premiers vrais contacts en tant qu’individu, sans commune mesure avec les voyages en famille, les films, les médias. Passer sept semaines en France, sac à dos, tout seul, faire du stop, dormir dans les auberges de jeunesse, c’est le début d’un grand amour. .

L’Île Maurice et les Mascareignes

Filigranes : Peux-tu nous dire un mot de la recherche que tu mènes actuellement ?

M.A. : Mon travail de thèse porte sur le roman contemporain mauricien d’expression française et anglaise. Je tente d’y repérer les convergences entre deux esthétiques post-coloniales : l’une francophone, l’autre anglo- saxonne.
Filigranes : Peux-tu nous citer quelques auteurs mauriciens ?
M.A. : Shenaz Patel, Ananda Devi, Nathacha Appanah-Mouriquand, parmi les femmes ; Barlen Pyamootoo, Carl de Souza, Bertrand De Roubillard pour les hommes. Les patronymes de ces auteurs seuls signalent une certaine configuration ethnique, ce qui pour Maurice joue un grand rôle. Cette génération d’écrivains francophones commen-ce à être connue ici. Elle est même éditée chez Gallimard ! Quant aux anglo-phones, moins connus, le pense à Lindsey Collen, une écrivaine phare. Très engagée, lauréate du prix du Commonwealth, elle est d’origine sud-africaine mais a immigré il y a trente-cinq ans à Maurice. Elle est reconnue comme Mauricienne. Il y a aussi Ramesh Bucktawar ou Sooresh Rago.

Filigranes : Comment découvres-tu ces auteurs ?

M.A. : Mon séjour de deux ans à l’île de La Réunion m’a ouvert à l’esprit de l’Océan Indien. En voyageant à Madagascar, aux Comores, à Maurice, une nouvelle réalité qui s’est installée en moi. Maurice m’intéresse tout particulièrement du fait de mes études d’anglais. Les Caraïbes mises à part, il y a très peu d’espaces où l’on peut faire communiquer ces deux traditions littéraires issues des colonisations britannique et française. Parmi les traces culturelles, elles ont laissé des empreintes linguistiques. Des productions française et anglaise sont nées et se pratiquent jusqu’à nos jours.

 

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