Le travail de l’écrit –
Entretien avec Bernard Pèlegrin.
Dans l’entretien qui suit Bernard Pèlegrin, ergonome et écrivain, témoigne d’un univers inhabituel pour « Cursives », celui de l’entreprise. On aurait tort d’imaginer que les questions concernant l’écriture et les pratiques du langage ne s’y posent pas, ou seulement marginalement. Réfléchir à ce que signifient « formaliser l’expérience de travail », « co-élaborer les savoirs du travail » est pour nous une manière de donner du sens et de l’épaisseur au sous-titre de Filigranes…revue d’écritures.
La formalisation comme accès au dire Filigranes : Qu’est-ce que « formaliser » l’expérience et d’où te vient l’idée de le faire. ? La première fois où, dans mon travail d’ergonome, j’ai pu mesurer l’effet de la formalisation de l’activité d’une opératrice, c’était en 1984 dans une entreprise de transformation de la laine dans le Nord de la France. J’étais invité à une réunion du Comité de cette entreprise. Kader y assistait comme représentant du personnel. Mon travail était de rendre compte d’une expertise « nouvelles technologies». Je présentais le rapport que j’avais fait et je l’étayais de transparents et autres graphes particuliers qu’on appelle des « chroniques de l’activité ». Kader était surnommé « Soupe au lait » à cause de ses réactions explosives en séance lorsque il constatait qu’on n’entendait pas ce qu’il tentait de vouloir dire. A la vue d’une des chroniques, il avait eu le mot suivant : « Eh bien voilà, ça fait des années que je disais que c’était pas possible. Ici le dessin le montre. On ne voulait pas m’entendre, mais là c’est bien clair ». Voilà une phrase qui m’est restée. C’était la première étude que je faisais et je découvrais l’efficacité de ce système de représentation pour rendre compte de mes observations sur le terrain. |
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Entretien avec Bernard Pelegrin
ergologue
(N°34)