Jean Amado ? J’ai dû le rencontrer en 1950 chez René Benlisa – Entretien avec Francis Finidori


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Entretien avec Francis Finidori
(c) (Photos Francis Finidori – Tous droits réservés)

Jean Amado ? J’ai dû le rencontrer en 1950 chez René Benlisa. À l’époque, je travaillais sur les quais de Marseille et un jour, en rentrant à pied, je trouve un petit cube en maçonnerie. Il y avait là un café dont les murs étaient constellés de ganches, en ex-voto. Ces instruments de dockers étaient engagés contre quelques verres. Le patron servait les pastis avec des brocs en forme de phallus, il n’était pas peu fier de ces pièces uniques. Je vois aussi des peintures d’une dureté, d’une fermeté qui m’ont fait penser à Artaud.
– C’est mon fils, dit le patron.
– Je peux le rencontrer ?
Après un premier contact, par téléphone, il m’invite à déjeuner du côté de Saint-Marc Jaumegarde…  Et je découvre une production encore différente, des projets de céramique… On devient amis.
Il me présente Amado. On ne s’est jamais plus quitté.

 

 

La Rencontre

Filigranes : Comment as-tu eu le projet de ce livre ?

F. F.: Après un intermède aux Beaux Arts, j’ai eu envie de faire de la photo et je suis allé dans une école en Sarre en 1954. J’y suis resté un an. Autour de moi, les espaces de la langue et de l’écriture étant déjà occupés, je me suis mis à la photographie et me suis retrouvé à faire les photos des catalogues d’exposition d’Amado. 
On me demandait souvent des textes, le premier a été une interview par Jean-François Jaeger, directeur de la Galerie d’art Jeanne Bucher à Paris. Je suis devenu presque naturellement, le déposi-taire de l’art de Jean Amado, de son œuvre.
Quand j’ai rencontré Jean, il ne s’exprimait pas sur sa production, mais peu à peu, pendant de longues années, nous en avons parlé ensemble. Il travaillait à un paysage qui ne finirait jamais, toujours en train de s’agrandir… Plein d’une énergie irrépressible, la dérive des continents… Contrairement au Land Art, Jean ne s’emparait pas du paysage, il le créait.
J’ai souvent collaboré au montage de ses expositions avec lui. On était trois ou quatre. A l’étranger, les salles d’expositions restent ouvertes au public pendant l’installation. Parfois, un visiteur entrait et demandait si l’artiste allait venir… Comment aurait-on pu deviner que cet homme en salopette rouge… était l’artiste ? Jean était un homme d’une grande simplicité.

Filigranes :  A quel moment ce projet de livre catalogue est-il devenu plus concret ?

F. F.: En 1997, La ville d’Aix-en-Provence m’a demandé d’organiser une exposition. Ce fut « Jean Amado, trente ans de sculpture ». On a couvert la ville entière. On était trois commissaires. Je me suis beaucoup investi.        
Ensuite, en 2004, le Rectorat d’Aix- Marseille a institué une année Amado. J’ai conçu une mallette pédagogique. J’ai fait des visites commentées, des ateliers, des visites de l’atelier… J’avais accompagné 3700 personnes ! Un vrai travail de terrassier.
Aussi, quand la ville d’Aix-en-Provence a fait entrer Amado au patrimoine, je suis devenu « l’officiel du sujet », naturellement !
La ville d’Aix a pris conscience, au fil des années, que le catalogue raisonné de l’œuvre de Jean, manquait. Comme elle me deman-dait des interventions, en contre-partie, j’ai demandé le financement du catalogue. Aussitôt dit, aussitôt fait.
Mais en 2005-2006, Madame le Maire liquide mes deux interlocuteurs lettrés. La Directrice des musées et le Directeur du patrimoine me reçoivent longuement, prêts à reprendre le flambeau. Un tour de table financier avec d’autres partenaires institutionnels et un rendez-vous en novembre 2006 apportent les certitudes nécessaires à sa réalisation.

 

 

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