2020 – Récups’ et maraudes


Ukraine / Retour sur Filigranes 65 (2005)

    « Est – Ouest et retour » à Nathalie Ferrier, notre amie si jeune perdue « Rien ne disparaît de ce qui a dû être abandonné  » Henri Wallon Tout a commencé par un pressant défi de Nathalie Ferrier, en poste au Centre Culturel français de Moscou : ce serait bien si les liens déjà tissés entre Moscou et Marseille perduraient dans un autre numéro de Fili (1) ! Faisons mieux connaissance avec nos littératures respectives. Offrons-nous réciproquement des textes d’auteurs auxquels nous tenons, représentant pour nous ce que nous aurions envie de faire savoir aux autres. Et à partir de là, chacun pourrait choisir et écrire en écho, en écart, en voisin ou en étranger. Les textes seraient comme des miroirs où se mirer, se reconnaître autre ou pareil… Les « prétextes  » joueraient le rôle de tremplin, d’apport, d’horizon en trouvant leurs destinataires. Tout cela était bel et bon. Mais Nathalie, sans avis préalable, une mauvaise nuit de novembre, s’en est allée rejoindre les anges… Peut-être de là-bas veille-t-elle encore : le flambeau a été repris et les fils renoués grâce à l’engagement et à l’amicale ténacité de Carole Foullon, qui a tenu envers et contre tout à faire vivre le projet. Alors, elle a battu le rappel et nos lointains correspondants Oleg, Sacha, Olga, Inna, Micha, Sergueï, Irina et les autres – tous francophones et francophiles – se sont mis de la partie et ont envoyé leurs pages […]


N° 106 « Glanages » – 12/2020 – (Vol 2 – « Récup’ et maraudes »)

ÉDITO « Il n’y a pas de désir qui ne coule dans un agencement. Si bien que le désir, pour moi, ça a toujours été – si je cherche le terme abstrait qui lui correspond – (celui de) constructivisme ». Gilles Deleuze, Abécédaire « Depuis la nuit des temps, depuis Lucie, peut-être avant, vous parcourez le monde, franchissez les grandes failles, longez les lignes de crêtes comme autant de lignes de vie. Infatigables voyageurs, femmes en marche, hommes de la migration, enfants du dépaysement ». Entendez-le, il y a quelques années déjà, vous figuriez au sommaire d’un numéro. Il est vrai qu’en votre compagnie, vagants extravagants, nous rêvions de mondes où les savoirs seraient de miel et où, heureux, nous vous accompagnerions. C’étaient des temps anciens. Nostalgiques et fascinés, de saison en saison, nous replongions vers vos récits anciens, vers le rouge or brun des paysages traversés, vers le noir de vos corps rompus se pliant et ramassant leur nourriture, vers le jaune blême de vos gilets de pauvreté. Vous, sans-terre, sans-nom, glanant, “ramassant dans un champ les épis qui ont échappé aux moissonneurs, recueillant au hasard des bribes dont on peut tirer quelque avantage”2. Mais l’heure tourne. Nos exacerbations consommatrices, nos brutalismes3, nos conflits, nos oublis (nature et humains confondus) : quelles démesures, quels excès ! Posant nos pas dans les vôtres, c’est à une réinvention que nous travaillons. Aux débordements annoncés, humblement nous résistons. Votre mémoire, vos savoirs perdus, vos ruses […]


N° 105 « Ça déborde » – 09/2020 – (Vol 1 – « Récup’ et maraudes »)

    )                                           ÉDITO   « Elle s’inquiète de la façon dont la langue dans laquelle elle rêve, qui lui est donnée à la naissance, est manipulée, mise en service, même retenue d’elle à certaines fins néfastes ». En tant qu’écrivaine, « elle considère la langue en partie comme un système, en partie comme une chose vivante sur laquelle on a le contrôle, mais surtout comme une intervention (…) »* Le débordement, le trop-plein sont au cœur des pages qui suivent. Les errements, les boulimies entretenues, les novlangues et mystifications publicitaires qui nourrissent les gaspillages et les privilèges de certains au détriment de tant d’autres, nous sommes nombreux à en constater l’impasse. Mais écrire, est-ce seulement dénoncer ? Ce qui déborde, n’est-ce pas, plus encore, au cœur de nos langues où des ruptures profondes pourraient s’inventer pour sursoir à la démesure ? « Ça déborde ». Déplaçons la question. Le prisme ici ce ne sont pas « les choses » seulement qui, à la manière de Perec, nous asservissent. Ni les radeaux de la Méduse qui creusent les mers. Pas plus les ravines autoroutières qui dénaturent l’espace, ni les caddies disposés en file indienne devant les caisses. Trop peu ? Trop plein ? L’humain s’interroge face à un monde où il n’est que passant, mais ne décrire nos sociétés que clivées par l’économie, ne porter notre […]