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{"id":1371,"date":"2020-05-22T15:32:10","date_gmt":"2020-05-22T15:32:10","guid":{"rendered":"http:\/\/filigraneslarevue.fr\/?p=1371"},"modified":"2020-05-22T15:32:10","modified_gmt":"2020-05-22T15:32:10","slug":"dans-lentre-deux-des-langues-entretien-avec-lothar-weber","status":"publish","type":"post","link":"http:\/\/filigraneslarevue.fr\/2020\/05\/22\/dans-lentre-deux-des-langues-entretien-avec-lothar-weber\/","title":{"rendered":"Dans l’entre-deux des langues – Entretien avec Lothar Weber\u00a0"},"content":{"rendered":"

Cet entretien est paru dans <\/span>
\nFiligranes n\u00b043<\/span>
\n\u00ab\u00a0Humain \/ Inhumain\u00a0\u00bb Mai 1999<\/span><\/p>\n

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L’entretien que nous proposons dans ce num\u00e9ro est l’occasion pour Filigranes de rendre hommage \u00e0 ceux de nos auteurs qui ont fait le choix et ont pris le risque – de ne pas \u00e9crire dans leur langue maternelle mais de faire le saut vers la langue \u00e9trang\u00e8re qu’est pour eux le fran\u00e7ais. Lothar Weber, citoyen allemand, enseignant de fran\u00e7ais, formateur d’enseignants en RFA (Land de Hesse), nous raconte comment il est entr\u00e9 dans le territoire de la langue fran\u00e7aise et y a d\u00e9couvert le bonheur d’\u00e9crire.<\/em><\/p>\n

 <\/p>\n

\u00ab\u00a0Si le mot que tu veux prononcer<\/em>
\nn \u2018est pas plus beau que le silence,<\/em>
\nne le prononce pas.\u00a0\u00bb<\/em>
\n(Sagesse Souf\u00ee)<\/em><\/p>\n

Les ann\u00e9es d\u2019apprentissage<\/span><\/h2>\n

Lothar Weber : J\u2019ai commenc\u00e9 \u00e0 apprendre le fran\u00e7ais \u00e0 l\u2019\u00e2ge de 14 ans. J\u2019ai fait 5 ans de fran\u00e7ais au ly\u2013c\u00e9e, puis 3 ans \u00e0 l\u2019Universit\u00e9. Pendant toute cette p\u00e9riode je n\u2019ai pas eu le sentiment d\u2019avoir r\u00e9ellement appris la langue, mais simplement de m\u2019y \u00eatre exerc\u00e9. Au d\u00e9but, cet apprentissage \u00e9tait peu int\u00e9ressant. Le manuel scolaire tenait lieu de Bible. Hors du livre point de salut.
\nLes choses ont pris une autre tournure en changeant d\u2019enseignant : il nous faisait parler, \u00e9crire, bref travailler directement dans la langue \u00e9trang\u00e8re. Par sa fa\u00e7on d’enseigner et de nous impliquer dans le travail, cet homme m\u2019a r\u00e9ellement donn\u00e9 l\u2019amour du fran\u00e7ais ! Le r\u00e9sultat a \u00e9t\u00e9 qu\u2019\u00e0 la fin de ma scolarit\u00e9 secondaire, j\u2019ai d\u00e9\u2013clar\u00e9 que je voulais devenir professeur. \u00ab\u00a0Faites des \u00e9tudes de fran\u00e7ais\u00a0\u00bb, m’a-t-il dit.
\nD\u00e8s cette \u00e9poque, la langue fran\u00e7aise (ma 4\u00e8me langue \u00e9trang\u00e8re apr\u00e8s l’allemand – \u00e0 la maison je ne parlais que le patois de notre r\u00e9gion – l\u2019anglais et le latin) m\u2019attirait par ses sonorit\u00e9s et sa musicalit\u00e9. Dans mon village de Hesse on m\u2019appelait \u00ab\u00a0Lothar le Fran\u00e7ais\u00a0\u00bb. J\u2019avais une fa\u00e7on de vivre qui \u00e9tait bien plus gaie que les autres, j\u2019aimais la bonne ch\u00e8re. Etre qualifi\u00e9 de fran\u00e7ais, cela me plaisait !
\nJ\u2019avais pens\u00e9 un moment faire des \u00e9tudes d\u2019anglais. Je parlais mieux l\u2019anglais, je sentais qu\u2019il me faudrait encore beaucoup travailler pour bien ma\u00eetriser le fran\u00e7ais. Mais qu\u2019importe ! Dans les cours, il y avait de la place et – contrairement aux groupes d\u2019anglicistes – beaucoup plus de femmes que d\u2019hommes ! Ceci m\u2019a donn\u00e9 \u00e0 penser que cette langue \u00e9tait plus f\u00e9minine. Une langue \u00e0 apprendre avec l\u2019\u00e2me et le coeur. Je dois dire qu\u2019au d\u00e9but, je m\u2019inqui\u00e9tais m\u00eame de ne pas \u00eatre assez masculin dans mes choix. Plus tard, j\u2019ai chang\u00e9 de point de vue sur cette question. J\u2019ai aussi pens\u00e9 que les femmes sont plus dou\u00e9es pour les \u00e9tudes de langues que les hommes.<\/p>\n

Filigranes : Quelles ont \u00e9t\u00e9 les r\u00e9actions dans ta famille ?<\/p>\n

Lothar Weber : Mes parents \u00e9taient rassur\u00e9s de me voir devenir enseignant, c\u2019est tout. Quant aux langues, eux ne parlaient que le patois de la Hesse du Nord et l\u2019allemand bien entendu. Il y avait peu de livres \u00e0 la maison. Mon p\u00e8re d\u00e9testait me voir lire et m\u2019envoyait travailler \u00e0 l\u2019\u00e9table ou ailleurs parce que, quand je lisais, je ne voyais plus ce qui se passait autour de moi. Je lisais beaucoup, surtout de la litt\u00e9rature populaire, des histoires de westerns, des romans d\u2019aventure. Il y avait aussi la biblio\u2013th\u00e8que de l\u2019\u00e9cole et la biblioth\u00e8que du village o\u00f9 j\u2019ai tout lu.<\/p>\n

Filigranes : Comment ton rapport au fran\u00e7ais a-t-il \u00e9volu\u00e9 \u00e0 l\u2019Universit\u00e9 ?<\/p>\n

Lothar Weber : A l\u2019Universit\u00e9, j\u2019ai d\u00e9couvert la litt\u00e9rature : Le Petit Prince notamment. Cela a \u00e9t\u00e9 le d\u00e9clic. Je l\u2019ai lu sur le champ pendant un s\u00e9minaire et plus rien d\u2019autre ne comptait. Je passais des heures dans la biblio\u2013th\u00e8que de l’Institut. Je me r\u00e9galais. Un monde nouveau s\u2019ouvrait \u00e0 moi : j\u2019\u00e9tais fascin\u00e9 par la beaut\u00e9 de ces textes, et heureux de les comprendre si bien. De Saint-Exup\u00e9ry \u00e0 Ronsard, en passant par Moli\u00e8re et bien d\u2019autres, j\u2019\u00e9tendais le cercle de mes lectures.<\/p>\n

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Les ann\u00e9es de voyage<\/span><\/h2>\n

 Lothar Weber : Je suis venu en France pour la premi\u00e8re fois \u00e0 l\u2019\u00e2ge de 22 ans, dans le cadre d\u2019un \u00e9change d\u2019\u00e9tudiants. Nous \u00e9tions h\u00e9berg\u00e9s dans une \u00c9cole Normale et c\u2019est l\u00e0 que j\u2019ai r\u00e9ellement commenc\u00e9 \u00e0 me mettre \u00e0 la langue parl\u00e9e. Au d\u00e9part, j\u2019\u00e9tais loin de parler librement. En huit semaines tout \u00e9tait l\u00e0. A la fin du s\u00e9jour, j\u2019\u00e9tais capable de m\u2019expri\u2013mer couramment en fran\u00e7ais.<\/p>\n

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Lire la suite.\u2026<\/span><\/h2>\n

Lothar Weber n\u00b043<\/a><\/span><\/h2>\n

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